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La recherche du laboratoire des hypothèses, heuristique.
Définition du protocole de recherche :
par Anaïs Rolez.

Le laboratoire des hypothèses est un espace physique et mental de recherche et d'expérimentation. Il est constitué d'expériences, de processus scientifiques et artistiques ainsi que de leur matérialisation.1\ Qu'est-ce qu'on cherche? À traverser la Loire au 1er siècle entre Rezé et Nantes.
Comment on cherche ? En trouvant des informations dont le rapprochement paraît pertinent, en formulant des hypothèses, en en sélectionnant certaines d'après un protocole afin de les réaliser techniquement. En questionnant les concepts utilisés avec le décalage d'une démarche artistique.
La fiction n'est qu'une base, une mise en condition pour vivre le processus (co-construit) de l'œuvre. En ce sens le processus est une forme qui se déroule dans le temps et dans l'espace. Il n'y a pas de confusion entre l'œuvre d'art et l'expérience de l'art, pas de fétichisation de l'objet réalisé puisque c'est le processus artistique en action qui est le véritable objet de cette recherche.
Le laboratoire des hypothèses est la construction d'un environnement contemporain élargi où l'artiste-chercheur n'est pas déconnecté du monde mais au contraire, en relation constante avec lui. S'associant avec des chercheurs de toutes disciplines, des artisans, des enfants, des personnes qui passent par hasard. Il y a une hétérogénéité, une démocratisation vécue. La recherche s'inscrit dans le réel, permettant un déploiement de la production artistique au-delà des limités pré-définies par le monde (de l'art par exemple).
Espace d'expérimentation aux réalités multiples, le laboratoire des hypothèses est un projet de recherche en art qui s'inscrit dans une herméneutique mêlant les représentations des réalités scientifiques aux potentiels de l'imaginaire. En explorant les possibles de l'interprétation, il s'agit de re-configurer l'espace et sa représentation, de décloisonner, de montrer par le décalage que l'expérience artistique peut être une réponse aux questions de définitions de la réalité, de la fiction, de la véracité ou de la preuve de l'existence et permet d'éprouver de manière sensible la zone fluctuante qui les sépare et les relie. Il s'agit d'un concept de l'art élargi.2\
Quels sont les liens entre l'Histoire et les histoires? Comment comprendre que les énoncés littéraires ou poétiques prennent corps? Qu'ils ont des effets réels et ne sont pas simplement des reflets du réel? Quel est le rapport entre la rationalité fictionnelle et les modes d'explication de la réalité historique et sociale? Entre la raison de la fiction et la raison des faits?3\
Le laboratoire des hypothèses propose le dépassement de la passivité par la participation à l'action d'imaginer et de faire.

L'énoncé proposé (trouver un moyen de traverser la Loire de Rezé à Nantes au 1er siècle après Jésus-Christ) est un outil agissant comme un point d'ancrage commun pour l'esprit des participants, les mettant en condition pour vivre le processus artistique sur plusieurs plans (rationnel, noétique, physique, sensible, etc.). Se posent alors les questions de la présence de la fiction et de son caractère éphémère, de la confiance, de la véracité (suspension de l'incrédulité consentie) et de la rationalité (théorie des 4 plans : rationalité logique (concept de signe), rationalité technique (concept d'outil), rationalité ethnique (concept de personne), rationalité éthique (concept de norme).
Tout en faisant émerger des questions sur les frontières entre réalité et fiction, entre art et science, le laboratoire des hypothèses fait exister un ensemble organisé. Il s'agit d'une proposition pour vivre l'expérience artistique globale mêlant de multiples approches (techniques, poétiques, artistiques, historiques, rationnelles, archéologiques, etc.) non hiérarchisées mais néanmoins cohérentes. De ces rapprochements émergent des sens, une actualisation de la conscience, et donc des ré-agencements de la réalité. Le processus de départ est la mise en situation de ces éléments. L'énoncé initial prend de l'épaisseur à mesure qu'il est questionné et est rapidement dépassé. C'est en ce sens que l'histoire (pour une part réelle et pour une autre part fictionnelle) n'est qu'un prétexte. Au même titre que l'efficacité matérielle.4\

L'échange, la mise en commun des idées, les interactions sont déjà une forme fluctuante dans un premier temps puis l'hypothèse, matériellement réalisée, devient un objet, une concrétion d'idées et d'actions, d'expériences et de choix qui la constituent. Dans ce contexte, la technique agit comme un moyen participatif.5\ Elle est à la fois une question et une réponse. L'artiste grâce à l'usage détourné auquel il soumet les techniques met au jour les puissances de pouvoir dont elles sont porteuses.6\
Il questionne les liens existant entre technique, mémoire et langage.7\
Tous ces éléments signifiants réagissent à mesure des rapprochements et des mises en situation. L'environnement, l'identité, la culture la société et tout ce qui participe à la construction de l'individu est mis au service de ce processus au même titre que l'œuvre elle-même. La forme et le fond ne sont pas séparables. C'est la pensée qui est elle-même comprise comme « processus sculptural ». L'objet témoigne d'ailleurs de son élaboration par des esprits et des mains. Il donne à voir le temps de son élaboration et présente pour ainsi dire sa mémoire. Les enregistrements et les photos sont également autant d'empreintes, de moyens pour piéger le temps. L'écriture, la citation, l'iconographe interviennent elles aussi comme des possibilités de captations de l'état de la mémoire à un moment donné. Le fonctionnement anachronique de la mémoire est souligné en travaillant la qualité fragmentaire des techniques et citations utilisées. L'œuvre matérialise ainsi un dispositif dont le fonctionnement s'apparente à celui de la mémoire en perpétuelle mouvement. On assiste à un jeu de collisions entre différentes temporalités nées de ces montages de fragments, offrant une expérience similaire à celle de la mémoire et proposant une esthétique du champ archéologique. Mémoire ouverte, collective et mouvante qui exhibe la fragmentation des possibilités et génère une multiplicité des référents temporels et techniques qui se laissent appréhendés dans un dynamisme propre à chacun et relatif à tous mettant au jour la divisibilité de l'esprit. On peut également relever la présence d'une préoccupation littéraliste concernant le temps, une perception de la temporalité, du temps passé et à venir, s'approchant et s'éloignant simultanément. Le participant est à l'intérieur, il est autour et au travers de l'hypothèse (dont l'abri est une réalisation concrète). À cela s'ajoute la notion de durée du projet de recherche – création qui s'inscrit dans une temporalité où il évolue et se construit, palier par palier, une identité imprévisible qui émerge progressivement.8\

1 L'art est une relation avec l'esprit où il se révèle. C'est l'esprit mis en condition d'accueil qui reconnaît l'art. Bernard Stiegler, De la misère symbolique, la catastrophé du sensible, ed. Gallilée, col. Incises, 2005.
2 Jacques Rancière, Le partage du sensible, Esthétique et politique, Paris, La Fabrique, 2000.
3Ibid
4 La production artistique est libre face aux contraintes relevant de la seule efficacité matérielle, elle est une réponse inventée face à un problème ouvert. La technique n'engage nullement la communication des esprits de la même manière que l'art. L'art est produit pour communiquer, il est un processus inter-subjectif par lequel une expérience est provoquée (B.Stiegler, op. cit.)
5 Et il faut participer pour sentir.
6 M.Foucault, L'extension sociale de la norme, dits et écrits, t.III, Gallimard, Paris, 1994. p.78.
7 Leroi-Gourhan, Le geste et la parole II, la mémoire et les rythmes, Paris, 1964, Albin Michel, p.36.
8 Bergson, L'évolution créatrice, 1907.
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